Affaire Bettencourt : Prévost-Desprez entendue comme témoin? Ca se précise...
Laurent Neumann - Marianne | Samedi 3 Septembre 2011 à 15:01 | Lu 4335 fois
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Pourquoi Isabelle Prévost-Desprez a-t-elle pris un tel risque en témoignant dans un livre ? Pour faire en sorte que l'enquête, encalminée cet automne, puisse être relancée notamment par son éventuelle déposition comme témoin, ainsi que celle de l'infirmière de Liliane Bettencourt. Cela ne devrait pas tarder.
Depuis la parution du livre « Sarko m’a tuer », signés par les journalistes du Monde, Gérard Davet et Fabrice Lhomme, nombreux sont ceux qui font mine de s’interroger sur le comportement de la juge de Nanterre Isabelle Prévost-Desprez : « mais qu’est-ce qu’il lui a pris », disent-ils ? Pourquoi prendre le risque de violer son devoir de réserve en évoquant les propos hors procès-verbal d’un témoin de l’affaire Bettencourt, en l’occurrence l’ex-infirmière de la milliardaire qui, dans l’édition de Marianne de ce jour, a démenti avoir évoqué, devant la juge ou en aparté à sa greffière, des remises d’argent liquide à Nicolas Sarkozy ?
La réponse est pourtant d’une simplicité biblique : à l’instant précis où les propos d’Isabelle Prévost-Desprez seraient publiés dans ce livre, les magistrats de Bordeaux, qui instruisent le volet politique de l’affaire Bettencourt (trafic d’influence, financement illicite d’activités politiques…), seraient obligés de l’entendre comme témoin. Dès lors, s’exprimant dans le bureau des magistrats instructeurs, elle serait délivrée du sacro-saint devoir de réserve. Isabelle Prévost-Desprez aura alors tout loisir de raconter par le menu tout ce qu’elle sait de ce dossier : la peur de certains des témoins qui ont défilé dans son bureau, les incroyables pressions policières sur l’ex-comptable de Liliane Bettencourt, Claire Thibout ; les pressions politiques sur la hiérarchie judiciaire ; le rôle-clé joué par le procureur de Nanterre, Philippe Courroye qui, dès le premier jour de cette affaire, a agi sur ordre pour qu’elle soit judiciairement enterrée… Peut-être dévoilera-t-elle aussi le nom d’un deuxième témoin qui, dans le secret de son bureau, lui a assuré avoir vu des remises d’argent liquide au domicile des Bettencourt à Neuilly…
Selon nos informations et compte tenu de la gravité des faits, la convocation d’Isabelle Prévost-Desprez par les juges de Bordeaux ne devrait pas tarder. Depuis mercredi soir, l’Elysée veut croire que l’interview accordée à Marianne par l’ancienne infirmière de l’héritière L’Oréal discrédite les propos tenus par la juge Prévost-Desprez dans le livre de Lhomme et Davet. Sans prendre en compte que cette femme, « honnête et modeste », a fait l’objet de menaces de mort après sa déposition devant les policiers de la brigade financière en janvier 2008. Rien que pour ça, elle devra aussi être entendue par les juges de Bordeaux.
Quant aux perroquets de la majorité et aux quelques éditorialistes déontologues qui feignent de se demander pourquoi Isabelle Prévost-Desprez n’a pas obligé l’infirmière à redire sur procès-verbal ce qu’elle aurait déclaré « off » à sa greffière sur ces fameuses remises d’enveloppes, ils doivent être frappés d’amnésie : à l’époque, Isabelle Prévost-Desprez n’était pas chargée du volet politique de l’affaire Bettencourt. Et pour cause : le procureur Courroye, grand ami de Nicolas Sarkozy et décoré par lui, s’est refusé pendant des mois et des mois à ouvrir une instruction, préférant contrôler lui-même ce dossier qui menaçait à tout moment d’exploser devant les grilles de l’Elysée.
Si l’on ajoute les révélations du journal Le Monde sur le flicage téléphonique d’un de ses journalistes (Gérard Davet) et d’un haut fonctionnaire du ministère de la Justice (David Sénat), organisé par le contre-espionnage français en dehors de tout cadre légal et sans doute à la demande soit du Ministère de l’Intérieur (Brice Hortefeux à l’époque), soit de l’Elysée, il y a fort à parier que cette affaire Bettencourt – que d’aucuns voulaient croire terminée - connaîtra sous peu de nouveaux rebondissements.
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